La cinémathèque de Corse

La prière aux étoiles exhumé

Corse Matin • Marie Stouvenot • 28 août 2024




Un doctorant en histoire de l’art vient de retrouver huit copies de travail d’une trilogie de films de Marcel Pagnol. En 1942, le réalisateur avait détruit les bobines à la hache pour éviter qu'elles ne tombent aux mains des Allemands.

priere_aux_etoiles_1.pdf Priere aux etoiles-1.pdf  (829.62 Ko)
C'est une trilogie signée Marcel Pagnol que l'on croyait perdue. Huit bobines de Prière aux étoiles, appelées copies de travail, ont été retrouvées par le Bastiais Valécien Bonnot-Gallucci, doctorant en histoire de l'art-cinéma à l’université Paris 1 Sorbonne et chercheur associé à la Cinémathèque de Corse. Quatre-vingts minutes d'images, visionnées depuis les archives du Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC). Celles-ci s'ajoutent aux « copies son » détenues par les descendants de Marcel Pagnol. S'il ne s'agit pas là de l'intégralité des scènes tournées en 1941, cette trouvaille reste particulièrement exceptionnelle. « Je préfère parler de copies exhumées plutôt que de découvertes, glisse le chercheur. Elles ont toujours existé, elles ont été conservées, il fallait simplement les retrouver pour les porter à la connaissance de tous. » Elles auraient été déposées au CNC dans les années 1970, peut-être à la suite d'un don anonyme.

Des bobines détruites à coups de hache
Les bobines originelles, elles, ont bien été détruites en 1942 par Marcel Pagnol lui-même. « Pendant l'occupation, la Continental Films,
une société de production cinématographique financée par les Allemands et créée par Goebbels (ministre de la propagande nazie, ndir), souhaite mettre la main sur la trilogie. Pour éviter de leurlivrer, Marcel Pagnol a détruit ces bobines à coups de hache. C'est à la fois un geste de contestation et de renoncement », raconte le chercheur.

«Mais nous savions que des copies de travail existaient, complète Nicolas Pagnol, le petit-fils de l'écrivain et cinéaste. Marcel en parle dans une interview donnée dans les années 1960. » Problème, malgré des recherches lancées par la famille auprès de la Fédération internationale des archives de films il y a une dizaine d'années, ces fameuses copies de travail n'avaient jamais refait surface. Jusqu'en décembre 2023, lorsque Valécien Bonnot-Gallucci les « exhume ».

Point de départ, la Cinémathèque de Corse
Ses recherches débutent deux ans plus tôt. Dans un premier temps, il lit le scénario de la trilogie conservé à la Cinémathèque de Corse, issu du fonds Robert Giordani, un décorateur de cinéma qui a notamment travaillé sur plusieurs des films de Marcel Pagnol. « Le cinéaste était très lié à la Corse par des attaches familiales et évidemment grâce à la proximité géographique », souligne le doctorant. Une fois le scénario en main, il part à la recherche des « copies de travail images ». Il sait seulement qu'une seule est  détenue par la famille Pagnol et que les ayants droit disposent aussi de douze bobines de sons. « Arrivé au CNC, j'ai été orienté, et bien orienté, par Béatrice De Pastre et Romain Blandin, respectivement directrice des collections et chargé d'études pour la consultation et l'accès aux collections, détaille Valécien Bonnot-Galluci. Ensuite, j'ai commencé à visionner. »

Une histoire d'amour confrontée aux désillusions
Sur les huit copies de travail, le jeune chercheur découvre une partie des scènes tournées par Marcel Pagnol, à la fois scénariste, réalisateur et producteur de cette trilogie. « Prière aux étoiles est une histoire d'amour entre une actrice et un musicien qui est également poète. Ces deux personnages sont joués par Josette Day et Pierre Blanchard. Il y a aussi Jean Chevrier qui incarne l'homme auquel est promise l'actrice. Les deux premiers se promettent un amour éternel mais vont être confrontés à des désillusions, décrit Valécien Bonnot-Gallucci. Cela s'inscrit dans le cinéma de Pagnol, mêlant le registre du conte au réalisme. » Des images inédites, et
donc jamais montrées au public, qui pourraient donner lieu à un documentaire selon Nicolas Pagnol. « Nous allons peut-être les présenter lors de conférences ou de festivals », indique le petit-fils du réalisateur. Valécien Bonnot-Galluci va, quant à lui, continuer ses recherches dans l'espoir de, peut-être, trouver de nouvelles bobines. Il continuera, aussi, à étudier ces copies de travail, retrouvées 83 ans après le tournage.

 
           

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